Taxi Driver, chef d’œuvre du cinéma des années 70 ou horsd’œuvre du célébrissime Scorsese ?
Nous vous offrons en bref tout ce qu’il faut savoir sur Taxi Driver… pour ensuite courir le regarder.
Le film qui a raflé la palme d’or à Cannes en 1976 a su montrer qu’il le valait, justement, son pesant d’or. Robert de Niro dans le rôle principal, joue un chauffeur de taxi au portrait psychologique tortueux mais terriblement poussé par Scorsese, en comparaison avec les productions de l’époque.
Un regard cru sur la vie urbaine
L’intrigue se déroule à New York, qui en ressort avec une image de perversion et de décadence exacerbée à la fois par le héros et par le réalisateur. Nous allons voir pourquoi. Travis Bickle, frappé d’insomnie suite au déséquilibre engendré par sa carrière dans la Marine américaine, décide d’occuper son temps libre en devenant chauffeur de taxi de nuit. C’est alors qu’il découvre la face cachée de New York, ainsi que ses recoins les plus sombres. Bien qu’il soit déterminé à les affronter, il est révolté par ce qu’il voit lors de ses errances sans but dans les rues de cette ville. Il se sent d’ailleurs en marge du monde où il évolue et passe son temps dans des cinémas pornographiques qui ne le divertissent pas tant que ça. Désillusionné par les femmes, il décide de tuer le nouveau président pour qui travaille Betsy, la femme qu’il aime, mais qui finit par le repousser. Un jour, une gamine prostituée qui entre dans son taxi pour s’enfuir donne un autre sens à sa vie. Il s’autoproclame alors son défenseur et se met en tête de la sauver. C’est bien Jodie Foster qui joue sa protégée, Iris, alors qu’elle n’était âgée que de douze ans. On imagine la controverse que cela a engendrée, notamment dans une scène où Scorsese met en avant l’amour entretenu entre le proxénète et la fillette. Scène d’un réalisme remarquable, puisqu’on en ressort avec un intense dégoût et une certaine révolte.
Le portrait psychologique de Bickle
On l’a déjà évoqué auparavant, mais la profondeur psychologique du personnage principal décrit par Scorsese est remarquable. On le sent entre la simplicité d’esprit et l’incompréhension du monde qui l’entoure, qui va jusqu’à le déconnecter de la réalité. Lorsqu’on le voit s’entrainer minutieusement avec des armes, pour un acte qu’il veut commettre pour soulager sa déception d’avoir été rejeté, on croit nager en plein délire. Il va même jusqu’à commettre des fautes irréparables qui pourraient le vendre, pour du frisson, une sorte de jeu. Son problème majeur est qu’il ne semble plus prendre conscience qu’il s’agit de la réalité et ce dès le milieu du film. Il se déconnecte et commet des actes au nom de sa propre justice. Il se venge donc en voulant assassiner, sans pour autant y parvenir, celui qu’il considère comme son rival : l’homme politique qui emploie Betsy. Il brutalise ensuite, avant de finalement l’abattre, le bourreau d’Iris. Il œuvre afin de rétablir les injustices, allant jusqu’à être blessé par balle et à sombrer dans un coma.
Les différentes interprétations de la fin
La dernière scène montre De Niro de nouveau dans son taxi, raccompagnant Betsy chez elle. Celle-ci semble se repentir de l’avoir rejeté et veut engager la conversation. Il reste cependant de marbre, la dépose et s’éloigne dans son taxi jaune, le sourire aux lèvres. Auparavant, on a pu observer punaisées au mur des lettres des parents d’Iris qui remercient le sauveur de leur fille, qui est retournée chez elle, en lieu sûr. Beaucoup y voient la réalité et la rédemption de Bickle qui semble avoir retrouvé la paix. D’autres penchent davantage vers la rêverie comateuse de celui-ci, alors qu’il agonise. Il imaginerait donc la suite de sa vie de façon positive.
Quoiqu’il en soit, cette happy end tranche avec l’atmosphère pesante dépeinte durant tout le film, et paraît un peu bâclée, voire peu crédible. Une jeune prostituée miraculeusement sauvée, une prétendante qui revient sur ses propos et se pend au cou de celui qui la dégoutait ? Un héros désillusionné qui subitement retrouve une certaine stabilité ? Le tout manque de matière et dessert ce film si novateur sur beaucoup de points.