Welcome to the Rileys, faux film indépendant pour vraie performance d’acteur
S’il n’a pas la candeur de son père (Ridley Scott), Jake Scott se révèle derrière la caméra aussi fin directeur d’acteurs que photographe talentueux. Avec ce second long-métrage, le réalisateur reste cependant dans des clous très établis, et le résultat n’est pas vraiment crédible.
Welcome to the Rileys montre un couple de quinquas très banal, si ce n’est la crise qui le secoue (et l’éloigne) depuis le décès de leur fille, dont ils ne parviennent pas à se remettre. Lui, Doug Riley, est interprété par le très charismatique James Gandolfini, ex patron des Soprano dans la série de David Chase, ici doux et sensible plombier banlieusard plein de tendresse et de subtilité.
Elle, Lois Riley, est jouée par Melissa Leo. Traumatisée par l’accident de sa fille, elle n’ose plus même mettre un pied hors du domicile conjugal.
Lui mène discrètement une seconde vie avec une serveuse.
Elle, frappante de rigidité et de pâleur, fait figure de poupée de cire raidie de douleur.
Lors d’un séminaire à la Nouvelle Orléans, Doug se prend d’affection pour une jeune stripteaseuse paumée, qui lui rappelle sa fille. Il va s’escrimer dès lors à la sauver de sa misère crasse, lui fournissant éducation et réconfort. Cette jeune femme est incarnée par nulle autre que Kirsten Stewart, alias Bella Swann, princesse des loups et des vampires de Twilight. La jeune comédienne est indéniablement charismatique, touchante même régulièrement, mais elle manque définitivement de répertoire.
Jusqu’ici, l’histoire tient la route. Et la première partie du film aussi d’ailleurs. Pourtant on sent bien que le film commence à s’étirer par le milieu ; progressivement le temps s’allonge, l’action devient pantouflarde, on a même droit à quelques vaines tentatives d’humour lorsque Lois, comprenant que son couple est fini, tente de prendre le volant et se retrouve le nez dans l’Airbag.
C’est la seconde partie du film qui vient confirmer le mauvais pressentiment croissant de la première demi heure ; après un développement laborieux et une mise en place du mécanisme dramatique un brin didactique, le propos tourne carrément court lorsque Lois débarque à la Nouvelle Orléans les cheveux en pagaille et le sourire aux lèvres. Dans son Audi de luxe, plus encore dans un motel d’autoroute comme seul l’Amérique sait les faire, voilà que notre mère de famille a vu la lumière. Elle se prend quasiment sans anicroche d’amour pour la jeune fille, qu’elle va bien entendu couver comme l’oiseau jaloux. Le virage de la bien-pensance est définitivement pris, le film consiste à partir de ce moment là en une série de clichés tous plus niais les uns que les autres.
Le sport qui consiste à enfoncer les portes ouvertes a un nouveau champion. Celui, plus subtil, qui consiste à tirer les larmes d’un maximum de spectateurs fans des romans scénaristiques sauce Sundance a consacré son nouveau maître.
Sous un alibi de faire de « l’indé », Jake Scott a façonné un film « gnangnan » où le seul enjeu est de faire dynamiquement apparaître deux stars antithétiques, l’imposant James Gandolfini et la chétive Kirsten Stewart ; le bonhomme sympathique et l’enfant terrible. Mais si lui est excellent d’intériorité et de finesse, elle se cantonne à deux ou trois expressions de l’anxiété à l’hystérie. Finalement, résistant à ce qui aurait put être le logique happy end dans le foyer de cette nouvelle petite famille (autour pourquoi pas d’un repas dominical avec bénédicité, tant qu’on y est), le réalisateur dans un sursaut opte pour une fin (un peu) plus subtile. En revanche, le plan final est tout de même d’un écœurant mélo qui s’étire encore et encore… jusqu’à épuisement.